LA COP 21, ET APRÈS ?

Le 12 décembre 2015 fut signé, dans un concert de congratulations et de gesticulations des personnalités siégeant sur l’estrade de la COP 21, la « convention-cadre sur les changements climatiques » tant attendue. Cette assemblée, dont il reste à établir le coût écologique incluant les émissions de GES associés au transport et séjour à Paris des 40 000 participants et d’autres menues sources d’énergie requises pour leur accueil, devait en principe marquer une rupture par rapport aux COP précédentes et produire un document contraignant permettant d’espérer, suivant les promoteurs de la manifestation, un avenir meilleur.

Or, quiconque a pris le temps de lire avec patience et attention le document en question découvrira qu’il n’est qu’un « évangile » où tout est livré à l’interprétation du lecteur et au bon vouloir des « parties ». 

Les chiffres, pourtant essentiels au projet, sont réduits à la portion congrue. Ainsi les 2 °C d’élévation de la température moyenne de la planète ne figurent que quatre fois dans un texte de 39 pages et dans trois cas il s’agit pratiquement du même texte. Le plus étonnant est que les paragraphes où apparait cette augmentation de température commencent avec des termes « impératifs », tels que « Insistant avec une vive préoccupation » et « Note avec préoccupation », qui laissent toute latitude aux parties pour prendre ce qui bon leur semble pour apaiser les « préoccupations » des signataires de la convention-cadre. Pour être plus précis examinons le troisième paragraphe de la page 2 du document. Il est écrit :

« Insistant avec une vive préoccupation sur l’urgence de combler l’écart significatif entre l’effet global des engagements d’atténuation pris par les Parties en termes d’émissions annuelles mondiales de gaz à effet de serre jusqu’à 2020 et les profils d’évolution des émissions globales compatibles avec la perspective de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 °C… »

Traduit en termes plus clairs on peut dire qu’il y a un « écart significatif » entre ce que les parties promettent et ce qu’il faudrait faire suivant le GIEC (même si le nom de cette institution ne figure pas dans le texte). Plus avant, en page 4, paragraphe 17 on insiste en écrivant :

« Note avec préoccupation que les niveaux des émissions globales de gaz à effet de serre en 2025 et 2030 estimés sur la base des contributions prévues déterminées au niveau national ne sont pas compatibles avec des scénarios au moindre coût prévoyant une hausse de la température de 2 °C, mais se traduisent par un niveau prévisible d’émissions de 55 gigatonnes en 2030, et note également que des efforts de réduction des émissions beaucoup plus importants que ceux associés aux contributions prévues déterminées au niveau national seront nécessaires pour contenir l’élévation de la température de la planète en dessous de 2 °C en ramenant les émissions à 40 gigatonnes ou en dessous de 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels en ramenant les émissions à un niveau devant être défini dans le rapport spécial mentionné au paragraphe 21 ci-après »

En d’autres termes, il faut passer des émissions de [GES] de 55 gigatonnes en 2030 dans des scénarios au moindre coût à 40 gigatonnes ou en dessous de 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels [on confond émission avec l’écart de température, conséquence attendue des émissions]. Mais pas un mot n’est dit de comment on passe de l’une à l’autre de ces chiffres et quels sont les engagements et les contraintes mises en œuvre pour y parvenir. 

Voici (page 6, §38) les « règles, modalités et procédures applicables au mécanisme pour le développement durable … sur la base des critères suivants :

a) La participation volontaire autorisée par chaque Partie concernée;

b) Les retombées bénéfiques à long terme réelles et mesurables liées à l’atténuation des changements climatiques;

c) La portée précise des activités;

d) Les réductions des émissions s’ajoutant à celles qui se produiraient autrement (sic);

e) La vérification et la certification des réductions des émissions résultant des activités d’atténuation des entités opérationnelles désignées;

f) L’expérience et les enseignements retirés des mécanismes existants et des démarches adoptées au titre de la Convention et de ses instruments juridiques connexes »

Les plus fortes exigences s’expriment (p. 16, § 106) par des termes tels que : « Demandant instamment …», « Réaffirmant sa détermination …», « Invitant les pays …». J’imagine que les pays et leurs représentants tremblent devant tant d’autorité et se dépêchent à mettre en œuvre leurs engagements (s’ils existent) !

En résumé, depuis le 12 décembre de l’année dernière la COP 21 a été totalement oubliée, ce qui n’est pas étonnant étant donné le contenu de l’accord qui l’a conclue, sauf pour le micro-drame qui s’est joué entre Madame Ségolène Royal et Monsieur Laurent Fabius pour garder le titre de Président de la COP 21. Une façon comme une autre de se faire mousser, écologiquement bien entendu.


DANIEL H. FRUMAN

Ajouter un commentaire

 

Date de dernière mise à jour : 02/03/2016

8 000 000 000

Le 11 juillet dernier l’ONU[1] nous faisait connaitre que « La population mondiale devrait atteindre 8 milliards [huit mille millions] d'habitants le 15 novembre 2022 ». En 2015, quand je me suis engagé dans la construction de ce site, nous n’étions que 7,38 milliards, ce qui représente « grosso modo » une augmentation de quelque 620 millions en huit ans (2015 à 2022 comprises), soit une croissance de plus de (620/7) 89 millions/an. Entre ces deux dates il y a eu un accident - la Covisd-19 en 2020 et 2021. Il fut la cause d’une diminution par rapport à la moyenne - suivi, si l’on croit les annonces de l’ONU, par une spectaculaire augmentation, estimée[2],  au bas mot, à 123 millions en 2022 (Table 1).

Table 1 – Évolution de la population mondiale entre 2015 et 2022
Données d’après
https://population.un.org/wpp/Download/Standard/MostUsed/                                    

ANNÉE

POPULATION

AUGMENTATION

2015

7 383 240

 

2016

7 469 955

86 715

2017

7 556 993

87 038

2018

7 642 651

85 658

2019

7 724 928

82 277

2020

7 804 974

80 045

2021

7 876 932

71 958

2022

8 000 000*

123 068

 

MOYENNE

88 109

     *  Estimation

Entre ces deux dates  les émissions de CO2[3]sont passées (arrondies au digit supérieur) de 33 à 36,3[4] Gt. Un calcul très simple montre que, si l’on considère les erreurs intrinsèques à l’estimation de ces chiffres, rien n’a changé entre les discours emphatiques et prometteurs de la COP 21 en 2015 et aujourd’hui.

En effet, la Table 2 résume ces données et montre que la moyenne des émissions de CO2 par tête d’habitant de la planète reste sensiblement la même, en dépit de la diminution des activités et l’augmentation des décès dus à la COVID-19 et ses variantes de 2020 à 2022.

Table 2 – Population et émissions de CO2 en 2015 et 2022
Données d’après
https://www.iea.org/reports/global-energy-review-co2-emissions-in-2021-2

ANNÉE

POPULATION

ÉMISSIONS CO2

ÉMISSION CO2 /HABITANT

 

Md

Gt

t

2 015

7,38

33,00

4,50[5]

2 022

8,00*

36,30*

4,54

*  Estimation

Ceci veut dire aussi que les décès ne compensent pas les naissances, qui se poursuivent inexorablement, même si la fécondité a diminué globalement, passant de 3,2 à 2,4 enfants/femme[6] entre 1990 et 2020. Et qui plus est, ces nouveaux nés arrivent en apportant, probablement à leur corps défendant,  une contribution aux émissions de CO2 presque égale à la contribution moyenne de chacun des êtres humains vivants au moment de leur naissance.  Elle est par ailleurs supérieure à celle déclarée nécessaire (2t), au cours d’une émission récente sur Public Senat, pour la subsistance d’un bébé[7].  Cette donnée est cependant 30 fois inférieure à celle annoncée (58.6 t) par une étude suédoise[8] de 2017. Contentons-nous donc de la statistique globale de la Table 2 et admettons que les petits émettent autant que les grands !

Ces 620 millions (9% de la population totale de 2015) de petits et jeunes enfants, dont l’âge maximale est inférieur à 7 ans, ne devraient pas contribuer substantiellement à une quelconque augmentation de la richesse, puisqu’ils ne sont pas en âge de le faire. Or, la Table 3 montre qu’entre 2015 et 2022 la population a augmenté de 9%, le PIB mondial de plus de 30% et celui per capita (dont les 620 millions de petits de moins de sept ans) de 20% ! Et ceci en dépit des conséquences de la « guerre » contre la Covid-19, qui aurait dû se traduire par, a minima, une stagnation de la richesse mondiale et une diminution des émissions de CO2

Table 3 – Population et PIB en 2015 et 2022
Données d’après
https://donnees.banquemondiale.org/indicator/NY.GDP.MKTP.CD et https://thedocs.worldbank.org/en/doc/18ad707266f7740bced755498ae0307a-0350012022/related/Global-Economic-Prospects-June-2022-Chapter-1-Highlights-FR.pdf

ANNÉE

POPULATION

PIB MONDE

PIB/HABITANT

 

 

Md

1000*Md $

$

 

2 015

7,34

75,23

10 249,32

 

2 022

8

98,89

12 360,86

 
 

9

31,4

20,6

AUGMENTATION %

 

Quoi conclure de ces chiffres ?

Si l’on est optimiste on aurait tendance à dire qu’en dépit du « cataclysme[9] » de la Covid 19 tous les indicateurs de croissance - population, richesse (PIB), émissions[10] de CO2, espérance de vie à la naissance, etc. – sont au vert et qu’ils risquent de continuer ainsi et se stabiliser, avec un peu de chance, quand « la fécondité étant en baisse » « Le nombre de personnes habitant sur la planète devrait … avoisiner les 11 milliards à la fin du siècle[11]»

Si l’on est pessimiste on pourrait espérer un vrai « cataclysme[12] », qui dépasserait en magnitude et gravité celui qui nous est prédit depuis plus de trente ans par les 26 COPs successives.

La guerre en Ukraine, dont les prémices - en termes stratégiques, économiques (micro et macro), financiers, politiques, sociétales, etc. – se font sentir avec une acuité peu courante pourrait être le déclencheur (détonateur ?) d’un nouveau paradigme de l’humanité. Et seulement de l’humanité puisque notre planète est, et restera encore pour des milliards d’années, totalement indifférent à notre existence, comme elle l’a été au cours des milliards d’années qui ont précédé notre présence pensante sur la mince croute terrestre.  

                                                                                                                             Daniel H. Fruman
                                                                                                                             14/08/2022

[2] La population en 2022 ne tient pas compte de l’augmentation probable entre le 15/11 et le 31/12/2022.

[4] On a pris la valeur des émissions en 2021puisque l’on n’a pas trouvé encore des estimations pour 2022. On peut cependant prévoir qu’elles seront beaucoup plus élevées. 

[5] En 2019 les émissions per capita en France étaient identiques à la moyenne monde - 4,469 t - suivant les données de la Banque Mondiale https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/EN.ATM.CO2E.PC?locations=FR

[5] Émission Sens Public sur Public Senat du 21/07/2022 22:00. « Un bébé 2t/an »

[7] Émission Sens Public sur Public Senat du 21/07/2022 22:00. « Un bébé 2t/an »

[9] « Le cataclysme du Covid-19 doit servir de catalyseur pour redéfinir notre politique du grand âge » (lemonde.fr). Bouleversement causé par un tremblement de terre, par un cyclone et par extension Désastre, bouleversement complet dans la situation d'un État, d'un groupe, d'une personne ; catastrophe.