Réponse à « Non à un retour à la normale »

Réponse à « Non à un retour à la normale »

Le 6 mai 2020 le journal Le Monde a publié une Tribune intitulée « Non à un retour à la normale » signé par deux cents personnalités représentatives du monde de la culture et de la science. Ce texte[1], que je vous invite à lire en bas de page, m’a interpelé et je me propose de donner mon avis, certainement pas aussi significatif que celui de toutes ces personnalités puisque je ne prétends avoir ni leur sagesse ni leur clairvoyance.   

Avant toute chose rappelons quelques notions essentielles pour cerner la source de nos problèmes, la planète Terre.

Notre planète existe, selon ceux qui doutent de la création de l’Univers décrite dans la Genèse, depuis 4 500 millions (4,5 milliards) d’années et elle existera encore pendant une durée au moins aussi grande. La vie[2] est apparue entre 3,5 et 3,8 milliards d'années. Les humains que nous sommes (sapiens) existent depuis environ 200 000 ans2, mais les premières traces montrant qu’ils déployaient une certaine activité intellectuelle et créatrice sont associées à l'homme de Cro-Magnon (ou moderne) d’il y a entre 48 000 et 12 000 ans[3]. Disons que nous sommes le résultat préhistorique d'activités menées dans une durée inférieure à 10-5 de l'existence de la planète Terre, soit quelques dixièmes de seconde avant minuit dans une journée ! Cinq extinctions massives[4] de la vie ont eu lieu depuis la première, il y a quelques 445 millions d’années, soit les derniers 150 minutes sur un total de 1440 de la même journée. Fort heureusement, sinon nous ne serions pas là pour le raconter, aucune des « extinction(s) massive(s) de la vie sur Terre » ne fut suffisamment « massive » pour éliminer toute trace de vie, de sorte que celle-ci se recomposa pour évoluer et atteindre ce que nous connaissons aujourd’hui.

Les Nostradamus modernes prédissent une nouvelle « extinction massive  de la vie sur Terre » due aux activités conduites par l’homme « moderne » au cours de ces dernières dixièmes de seconde qui précèdent l’avènement d’une nouvelle journée. Cette horripilante perspective est le thème de la tribune des personnalités de la culture et de la science qui considèrent que « la Covid-19 est une tragédie » et que « La catastrophe écologique en cours relève d’une « méta-crise » : l’extinction massive de la vie sur Terre ne fait plus de doute et tous les indicateurs annoncent une menace existentielle directe. À la différence d’une pandémie, aussi grave soit-elle, il s’agit d’un effondrement global dont les conséquences seront sans commune mesure »

Examinons de plus près ces déclarations apocalyptiques, dignes des écrits de Saint Jean l'Évangéliste et d'autres prédicateurs millénaristes.

Ils nous disent "le Covid-19 est une tragédie". Oui, c'est vrai, c'est une tragédie pour ceux qui ont perdu un être cher à cause, directement ou indirectement, dudit virus et cela mérite toute notre empathie et je partage leur douleur. Mais pour la société dans laquelle nous vivons, les près de 8 milliards de personnes qui se pensent humains, ce n’est pas nécessairement une tragédie. Rappelons-nous  que la "grippe espagnole" a tué en "une seule année entre 20 et 40 millions de personnes" alors que la population totale de la planète était de 1,9 milliard, un quart de l’actuelle. En France seulement elle a fait plus de 400 000 morts[5], « ce qui est plus important qu’une année de combat de la Première Guerre mondiale » pour une population qui n’était que de 40 millions, soit 60% de celle de 2019 ! Il faut savoir raison garder. La grippe espagnole était en effet une tragédie dont les conséquences auraient pu mener « le monde à un point de rupture », tel que celui qui nous est annoncé par nos prédicateurs dans leur tribune.

Ceci n’a pas été le cas et moins de vingt ans plus tard le monde a subit une guerre mondiale d’une extrême cruauté qui se solda par des pertes civiles et militaires (camps de concentration inclus) de l’ordre de 60 millions de morts soit 2,5 % de la population mondiale de l’époque[6]. Voici une nouvelle et véritable tragédie qui, associe à ce que nous appelons aujourd’hui les dommages collatéraux, aurait pu mener « le monde à un point de rupture ». Pourtant, et malgré les prévisionnistes qui annonçaient que notre planète ne pourrait jamais produire suffisamment de nourriture, que les armes atomiques allaient nous réduire en cendres, que nous allions être anéantis par des pandémies de toute nature comme le VIH et bien d’autres malheurs, il n’y a pas eu de « point de rupture ». Que je sache la planète a continué à tourner (c’est vrai qu’il serait difficile de l’arrêter) et les humains à se multiplier et à prospérer. En effet, la population mondiale atteint aujourd’hui presque 8 000 millions de personnes qui ont été nourries de mieux en mieux malgré ce que disent les riches qui peuvent se permettre de garder leur silhouette en mangeant des produits «bio» dont le prix permettrait à l'un des 3 millions d'enfants qui meurent de faim chaque année de se nourrir pendant toute leur vie en consommant un tout petit peu des restes que ces mêmes riches jettent aux poubelles.

Et globalement, n'est-ce pas beaucoup plus grave la tragédie de 734 millions d'habitants qui vivent (si l’on peut dire) avec moins de 1,90 $ par jour[7] ? Ou les 854 millions de personnes qui souffrent de malnutrition parmi lesquels 25 000[8], dont 10 000 enfants, meurent chaque jour de faim et de causes associées ? Et, pour finir cette triste liste, est-il acceptable que la moitié de la population de la planète n'ait pas accès aux services de santé essentiels[9] ?

Et parlons maintenant de la déclaration invraisemblable qui établit péremptoirement «…l’extinction massive de la vie sur Terre ne fait plus de doute et tous les indicateurs annoncent une menace existentielle directe. À la différence d’une pandémie, aussi grave soit-elle, il s’agit d’un effondrement global dont les conséquences seront sans commune mesure »

Il ne s'agit pas ici d'une réflexion mais d'une succession de termes, chacun induisant une angoisse plus grande que la précédente. Ainsi, cela va de « l'extinction massive de la vie sur Terre » à sa conséquence immédiate la « menace directe pour notre existence[10]». Cela est évident car nous faisons partie de la vie et si elle s’éteint, je ne vois pas comment nous pourrions continuer à exister. Entre tout ce verbiage sémantiquement fragile et pseudo-scientifique, on intercale la « méta-crise" » et les « indicateurs » sans définir la première et rendre explicits les seconds.

Ils disent que « le Covid-19 est une tragédie » mais ajoutent que la « méta-crise » va beaucoup plus loin que la tragédie annoncée car « il s’agit d’un effondrement global dont les conséquences seront sans commune mesure ». Mais, si c'est "l'extinction massive de la vie sur Terre" il est évident que nous parlons d'un "effondrement global" de la vie et seulement de la vie (puisque la planète continuera d'exister sans aucun doute pendant environ 4 à 5 milliards d'années de plus avec ou sans vie). Que les « conséquences seront sans commune mesure » c’est indubitable puisque il s’agit de la disparition de notre espèce (ce qui est tout à fait possible comme cela s'est produit avec les dinosaures et autres bêtes éteintes sans que la vie ne disparaisse complètement). La différence avec la disparition des dinosaures est que, les humains étant totalement disparus, aucun autre être vivant ne demeurera « en capacité[11] » de penser le monde et son avenir ?

La pire partie du manifeste est le dernier paragraphe où, avec la force et l’orgueil anthropocentrique[12] le plus détestable, les signataires attirent l'attention « des dirigeants et les citoyens » pour que puisse être évité  l’« effondrement global dont les conséquences seront sans commune mesure ». En effet, nous habitons une planète dont le diamètre est de 1,3 104 km plongé dans un univers observable dont le diamètre estimé est de 8,8*1023 km[13]. Si la hauteur moyenne d’un  humain est, pour simplifier nos calculs, 1,3 m, il faudrait empiler 10 millions d’humains moyens pour avoir le diamètre de la terre et 70 millions de millions de millions de planètes Terre pour avoir le diamètre de l’univers. Notre petitesse est telle qu’il faut un certain esprit de démesure pour prétendre que sommes « en capacité » d’agir sur un « effondrement global », quel que soit son origine et « a fortiori » de le provoquer. Et « les conséquences seront sans commune mesure » par rapport à quoi ? Quelle est l’unité de mesure ou la référence qui sert d’étalon ? Peut-être le déluge ou la destruction de Sodome et Gomorrhe si l’on fait référence à la Bible, ou à la Shoa ou Hiroshima et Nagasaki si l’on se réfère à notre histoire plus récente ?

Ces dangers les amènent à trouver un coupable puisque « Le consumérisme nous a conduits à nier la vie en elle-même » ! Je ne sais pas quand est-ce que les auteurs de la tribune postulent le début de l'ère "consumériste" mais on peut supposer qu'ils l'ont associée au départ de la révolution industrielle (mère de tous les maux !) vers 1850 alors que la population mondiale était de 1,2 milliard d'habitants. Ce chiffre a été atteint, comme je l'ai déjà dit, en environ 30 000 ans d’existence de l’homme « moderne ». Entre 1850 et aujourd'hui[14], « la vie en elle-même » n’a pas été niée mais s'est incontestablement affirmée. Les humains que nous sommes se sont reproduits d'une part et ont étonnamment augmenté leur espérance de vie d'autre part, pour réussir ainsi à faire en sorte d’être 6,5 fois plus nombreux qu’alors. Et ceci a été possible en grande partie sinon en totalité grâce au « consumérisme » tant décrié.

Le « consumérisme » dont ils sont des acteurs privilégiés et pas seulement des spectateurs a donné la possibilité d'offrir de meilleures conditions de vie à une population en constante augmentation. Cependant, il peut être regretté que cette capacité de consommer n’ait pas été plus partagée et que les disparités entre les plus pauvres et les plus riches deviennent de plus en plus aiguës. Mais cela ne semble pas les affecter beaucoup sauf à énoncer les « inégalités sociales toujours croissantes » après « La pollution, le réchauffement et la destruction des espaces naturels ».

Ce qui les inquiète, c'est que les activités humaines, même les leurs j'espère, « mènent le monde à un point de rupture » ! Mais quel est ce point de rupture ? Sachant que le « monde[15] » est « l’ensemble de tout ce qui existe, de façon réelle et concrète ; univers », on est en droit de se demander où, comment et quand aura lieu ce « point de rupture » que ces évangélistes modernes nous annoncent. Je ne le sais et je suis persuadé qu'ils ne le savent pas non plus, ni de manière réelle ni de façon symbolique.

Serait-ce que notre planète va disparaître ? Espoir inutile dans un laps de temps mesuré en fonction de la durée de la présence humaine sur cette même planète. C'est peut-être la contamination ? Mais les oracles delphiques ne nous disent pas ce qui va nous contaminer et l'expérience de plusieurs millénaires indique que ce n'est pas une procédure très efficace pour effacer la vie de la surface de la planète. Le réchauffement ? La planète a déjà subi de nombreuses périodes de refroidissement et de surchauffe sans qu'elles empêchent la continuité de la vie. La destruction des espaces naturels ? Mais cela n'a jamais conduit à « un point de rupture » : des forêts sont devenues des déserts, des déserts sont devenus des jardins, des ports ont été comblés, des plages ont été effacées et d’autres crées, des villes ont été englouties par la montée de la mer et on les a reconstruit, des volcans ont craché de la lave et des cendres et enfoui des villes et des paysages entiers, mais aussi créé des montagnes et des îles, des tsunamis ont dévasté des territoires et fait des ravages indicibles, des tremblements de terre ont ouvert des sillons profonds dans la croûte terrestre, rasé des villes et provoqué la désolation et la terreur, et cela s’est produit au cours  des millions et des millions d'années et continuera à se produire, je l’espère, pendant d'autres millions et millions d'années ; que les hommes le veuillent ou pas.

Si vous avez eu la patience et la curiosité de me lire jusqu'ici, vous devez avoir conclu que je ne suis pas du tout d'accord avec les membres de cette cohorte de personnalités. Je les associe à ceux qui, dans de temps plus ou moins lointains, achetaient des indulgences à l'Église catholique pour être lavés de leurs péchés.

Quels sont ces nouveaux péchés ? Vivre dans des appartements ou des maisons spacieux avec chauffage et climatisation produits au pire par des combustibles fossiles et au mieux nucléaire, avoir une ou plusieurs voitures, communiquer avec un iPhone, utiliser un iPad ou un PC ou les deux, une ou plusieurs télévisions, plusieurs machines pour laver la vaisselle et les vêtements et aussi les sécher, voyager en avion pour des raisons professionnelles et personnelles, manger à sa faim matin, midi et soir, bénéficier de soins de santé, avoir accès à une retraite assurant une vieillesse confortable, à des loisirs et à la culture en général, à l’électricité et à l’eau sans restriction (même quand elle est utilisée pour entretenir des terrains de golf dans des pays où elle est une denrée rare), et bien d'autres choses, comme contribuer à la croissance de la population et à la perpétuation de notre espèce sur la planète et, finalement, persister à ignorer que le « monde » ne peut pas être sauvé ni avec les bons ni avec les mauvais sentiments de notre espèce, qui n’est que de passage et pour très peu de temps à l’échelle de notre « monde » qui se fiche complètement des opinions et des actes des humains. Il est là depuis 4 500 millions d'années et se porte très bien malgré ce que nous prédisent les prêcheurs précités.

Daniel H. Fruman
le 14 mai 2020
http://malthusausecours.e-monsite.com/

[1] « La pandémie de Covid-19 est une tragédie. Cette crise, pourtant, à la vertu de nous inviter à faire face aux questions essentielles. Le bilan est simple : les « ajustements » ne suffisent plus, le problème est systémique. La catastrophe écologique en cours relève d’une « méta-crise » : l’extinction massive de la vie sur Terre ne fait plus de doute et tous les indicateurs annoncent une menace existentielle directe. À la différence d’une pandémie, aussi grave soit-elle, il s’agit d’un effondrement global dont les conséquences seront sans commune mesure. Nous appelons donc solennellement les dirigeants et les citoyens à s’extraire de la logique intenable qui prévaut encore, pour travailler enfin à une refonte profonde des objectifs, des valeurs et des économies. Le consumérisme nous a conduits à nier la vie en elle-même : celle des végétaux, celle des animaux et celle d’un grand nombre d’humains. La pollution, le réchauffement et la destruction des espaces naturels mènent le monde à un point de rupture. Pour ces raisons, jointes aux inégalités sociales toujours croissantes, il nous semble inenvisageable de « revenir à la normale ».https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/05/06/non-a-un-retour-a-la-normale-de-robert-de-niro-a-juliette-binoche-de-joaquin-phoenix-a-angele-l-appel-de-200-artistes-et-scientifiques_6038775_3232.html

[2] https://www.hominides.com/html/chronologie/chronoterre.php

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Homme_de_Cro-Magnon

[4] https://www.universalis.fr/encyclopedie/extinctions-biologiques/7-la-fin-de-l-ordovicien/

[5] https://francearchives.fr/fr/commemo/recueil-2018/82611687

[6] https://fr.wikipedia.org/wiki/Bilan_de_la_Seconde_Guerre_mondiale

[7]https://www.banquemondiale.org/fr/topic/poverty/overview

[8]https://www.un.org/fr/chronicle/article/chaque-jour-25-000-personnes-meurent-de-faim

[9]https://news.un.org/fr/story/2017/12/373422-la-moitie-de-la-population-de-la-planete-na-pas-acces-aux-services-de-sante                   

[10] Notez bien qu’il s‘agit bien de « notre » existence et non pas l’existence « de la vie sur Terre ». Anthropocentrisme que nous allons aborder plus loin.

[11] « Compétence et habileté dans un domaine » mis à la mode par notre personnel politique. 

[12] L’anthropocentrisme est une conception philosophique qui considère l’humain comme l'entité centrale la plus significative de l'Univers et qui appréhende la réalité à travers la seule perspective humaine. (https://es.wikipedia.org/wiki/Antropocentrismo).

[13] 880 000 000 000 000 000 000 000 (880 000 milliards de milliards de kilomètres) https://fr.wikipedia.org/wiki/Univers_observable

[14] https://www.worldometers.info/fr/population-mondiale/

[15] https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/monde/52177

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Date de dernière mise à jour : 31/05/2020

8 000 000 000

Le 11 juillet dernier l’ONU[1] nous faisait connaitre que « La population mondiale devrait atteindre 8 milliards [huit mille millions] d'habitants le 15 novembre 2022 ». En 2015, quand je me suis engagé dans la construction de ce site, nous n’étions que 7,38 milliards, ce qui représente « grosso modo » une augmentation de quelque 620 millions en huit ans (2015 à 2022 comprises), soit une croissance de plus de (620/7) 89 millions/an. Entre ces deux dates il y a eu un accident - la Covisd-19 en 2020 et 2021. Il fut la cause d’une diminution par rapport à la moyenne - suivi, si l’on croit les annonces de l’ONU, par une spectaculaire augmentation, estimée[2],  au bas mot, à 123 millions en 2022 (Table 1).

Table 1 – Évolution de la population mondiale entre 2015 et 2022
Données d’après
https://population.un.org/wpp/Download/Standard/MostUsed/                                    

ANNÉE

POPULATION

AUGMENTATION

2015

7 383 240

 

2016

7 469 955

86 715

2017

7 556 993

87 038

2018

7 642 651

85 658

2019

7 724 928

82 277

2020

7 804 974

80 045

2021

7 876 932

71 958

2022

8 000 000*

123 068

 

MOYENNE

88 109

     *  Estimation

Entre ces deux dates  les émissions de CO2[3]sont passées (arrondies au digit supérieur) de 33 à 36,3[4] Gt. Un calcul très simple montre que, si l’on considère les erreurs intrinsèques à l’estimation de ces chiffres, rien n’a changé entre les discours emphatiques et prometteurs de la COP 21 en 2015 et aujourd’hui.

En effet, la Table 2 résume ces données et montre que la moyenne des émissions de CO2 par tête d’habitant de la planète reste sensiblement la même, en dépit de la diminution des activités et l’augmentation des décès dus à la COVID-19 et ses variantes de 2020 à 2022.

Table 2 – Population et émissions de CO2 en 2015 et 2022
Données d’après
https://www.iea.org/reports/global-energy-review-co2-emissions-in-2021-2

ANNÉE

POPULATION

ÉMISSIONS CO2

ÉMISSION CO2 /HABITANT

 

Md

Gt

t

2 015

7,38

33,00

4,50[5]

2 022

8,00*

36,30*

4,54

*  Estimation

Ceci veut dire aussi que les décès ne compensent pas les naissances, qui se poursuivent inexorablement, même si la fécondité a diminué globalement, passant de 3,2 à 2,4 enfants/femme[6] entre 1990 et 2020. Et qui plus est, ces nouveaux nés arrivent en apportant, probablement à leur corps défendant,  une contribution aux émissions de CO2 presque égale à la contribution moyenne de chacun des êtres humains vivants au moment de leur naissance.  Elle est par ailleurs supérieure à celle déclarée nécessaire (2t), au cours d’une émission récente sur Public Senat, pour la subsistance d’un bébé[7].  Cette donnée est cependant 30 fois inférieure à celle annoncée (58.6 t) par une étude suédoise[8] de 2017. Contentons-nous donc de la statistique globale de la Table 2 et admettons que les petits émettent autant que les grands !

Ces 620 millions (9% de la population totale de 2015) de petits et jeunes enfants, dont l’âge maximale est inférieur à 7 ans, ne devraient pas contribuer substantiellement à une quelconque augmentation de la richesse, puisqu’ils ne sont pas en âge de le faire. Or, la Table 3 montre qu’entre 2015 et 2022 la population a augmenté de 9%, le PIB mondial de plus de 30% et celui per capita (dont les 620 millions de petits de moins de sept ans) de 20% ! Et ceci en dépit des conséquences de la « guerre » contre la Covid-19, qui aurait dû se traduire par, a minima, une stagnation de la richesse mondiale et une diminution des émissions de CO2

Table 3 – Population et PIB en 2015 et 2022
Données d’après
https://donnees.banquemondiale.org/indicator/NY.GDP.MKTP.CD et https://thedocs.worldbank.org/en/doc/18ad707266f7740bced755498ae0307a-0350012022/related/Global-Economic-Prospects-June-2022-Chapter-1-Highlights-FR.pdf

ANNÉE

POPULATION

PIB MONDE

PIB/HABITANT

 

 

Md

1000*Md $

$

 

2 015

7,34

75,23

10 249,32

 

2 022

8

98,89

12 360,86

 
 

9

31,4

20,6

AUGMENTATION %

 

Quoi conclure de ces chiffres ?

Si l’on est optimiste on aurait tendance à dire qu’en dépit du « cataclysme[9] » de la Covid 19 tous les indicateurs de croissance - population, richesse (PIB), émissions[10] de CO2, espérance de vie à la naissance, etc. – sont au vert et qu’ils risquent de continuer ainsi et se stabiliser, avec un peu de chance, quand « la fécondité étant en baisse » « Le nombre de personnes habitant sur la planète devrait … avoisiner les 11 milliards à la fin du siècle[11]»

Si l’on est pessimiste on pourrait espérer un vrai « cataclysme[12] », qui dépasserait en magnitude et gravité celui qui nous est prédit depuis plus de trente ans par les 26 COPs successives.

La guerre en Ukraine, dont les prémices - en termes stratégiques, économiques (micro et macro), financiers, politiques, sociétales, etc. – se font sentir avec une acuité peu courante pourrait être le déclencheur (détonateur ?) d’un nouveau paradigme de l’humanité. Et seulement de l’humanité puisque notre planète est, et restera encore pour des milliards d’années, totalement indifférent à notre existence, comme elle l’a été au cours des milliards d’années qui ont précédé notre présence pensante sur la mince croute terrestre.  

                                                                                                                             Daniel H. Fruman
                                                                                                                             14/08/2022

[2] La population en 2022 ne tient pas compte de l’augmentation probable entre le 15/11 et le 31/12/2022.

[4] On a pris la valeur des émissions en 2021puisque l’on n’a pas trouvé encore des estimations pour 2022. On peut cependant prévoir qu’elles seront beaucoup plus élevées. 

[5] En 2019 les émissions per capita en France étaient identiques à la moyenne monde - 4,469 t - suivant les données de la Banque Mondiale https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/EN.ATM.CO2E.PC?locations=FR

[5] Émission Sens Public sur Public Senat du 21/07/2022 22:00. « Un bébé 2t/an »

[7] Émission Sens Public sur Public Senat du 21/07/2022 22:00. « Un bébé 2t/an »

[9] « Le cataclysme du Covid-19 doit servir de catalyseur pour redéfinir notre politique du grand âge » (lemonde.fr). Bouleversement causé par un tremblement de terre, par un cyclone et par extension Désastre, bouleversement complet dans la situation d'un État, d'un groupe, d'une personne ; catastrophe.